Derrière nos comportements imprévisibles, nos discours incohérents, notre agressivité, se cachent souvent en réalité des mécanismes de défense. Savoir les repérer est très important pour comprendre les autres.
Confrontés à un drame, à une souffrance, à des frustrations, nous utilisons TOUS des mécanismes de défense pour « protéger notre ego », pour éviter des pensées pénibles à notre conscience. Freud était le premier à avoir listé et décrit ces différents types d’opérations psychiques visant à réduire ces conflits et tensions internes dans l’inconscient : le refoulement, la projection, la régression, la sublimation, le déni, la rationalisation… Et oui, car beaucoup d’entre nous les utilisons inconsciemment sans le savoir !
MÉCANISMES DE DÉFENSE : DEUX CAS CONCRETS POUR COMPRENDRE
Plutôt que de dresser la liste de tous les mécanismes de défense et tomber dans un registre psychanalytique incompréhensible, je vais donner deux exemples choc de situation qui permettront au lecteur de comprendre chaque notion. De cette manière, ce sera plus parlant que des définitions. Commençons avec l’exemple de Marine, l’anxieuse :
Marine a vingt-quatre ans et vit chez ses parents. Elle a toujours été une jeune femme timide, réservée, anxieuse. Elle a arrêté ses études d’économie au bout de la deuxième année de licence car le contact avec les autres étudiants et les épreuves d’exposés oraux rendaient son quotidien trop anxiogène à la fac.
Au collège déjà, Marine a souvent été victime de scènes de quolibets de la part de ses camarades à cause de son mutisme, de sa différence. Lorsque ses parents lui en parlent, Marine assure ne pas se souvenir de cette période de sa vie. Le refoulement est un mécanisme de défense qui permet à Marine de rejeter des souvenirs traumatisants au fond de son inconscient.
De plus, sa vie sociale est morose : Marine évite régulièrement les sorties, décline les invitations, de crainte de ne pas savoir quoi dire quand elle rencontre des inconnus. Lorsque des gens de son entourage lui parlent de son mal-être, Marine a des sauts de mauvaise humeur et refuse d’entendre parler de « timidité ou de phobie sociale » alors qu’elle se sait concernée. Elle fait tout pour chasser immédiatement ces pensées gênantes. Le déni de réalité lui permet d’occulter une réalité trop pénible ou honteuse.
À côté, pour combler sa solitude, Marine se réfugie sur Internet, sur les réseaux sociaux, sur Skype. À travers sa page Facebook, elle parle régulièrement de sa passion pour les voyages et les jeux vidéo, où elle est lue par les internautes et reçoit des commentaires positifs pour ses billets. Elle fait de la compensation en s’investissant dans un domaine qui lui fait oublier son mal-être…
Puis, venons à l’exemple avec Hugo, l’introverti :
Hugo a 31 ans et travaille comme ingénieur dans une société en informatique. Il est fier de la réussite de ses études, de ses diplômes, de son salaire. En revanche, du côté de la vie affective et sexuelle, Hugo n’est pas du tout doué avec les femmes et collectionne les râteaux. Il est frustré. Hugo lit régulièrement des livres de développement personnel, absorbe toutes les informations qu’il trouve sur les techniques de séduction. Il participe de temps en temps à quelques soirées, mais en vain, puisque cinq années plus tard, sa situation n’a pas évolué. Il fait de l’activisme, un mécanisme de défense où il a recours à de nombreuses activités extérieures pour se donner l’illusion de la résolution de ses problèmes alors qu’il ne se passe rien en réalité.
Lorsque son entourage lui parle de son célibat, Hugo rejette la faute sur les femmes qu’il juge hypocrites, malsaines, condescendantes. Pour lui, les femmes le détestent et n’acceptent pas sa personnalité. Hugo fait de la projection, il attribue aux autres la cause de ses problèmes pour éviter de blesser son estime de soi et de prendre conscience de ses aspects négatifs.
En même temps, il fait de la rationalisation en expliquant que son célibat est lié à la société individualiste d’aujourd’hui. Il fait des contorsions intellectuelles pour s’auto-persuader que l’amour n’est qu’une ruse de la Nature en vue de la simple reproduction…
MÉCANISMES DE DÉFENSE : EFFETS BÉNÉFIQUES OU NUISIBLES ?
Vous avez à présent une meilleure idée de ce signifient les mécanismes de défense. Il faut bien comprendre que ce sont des processus psychiques naturels, à la fois positifs et négatifs. Ils ont des fonctions de préservation, d’équilibre, car notre esprit ne peut pas supporter continuellement des tensions, des conflits, des situations émotionnelles dures, sinon « notre cerveau implose ».
Bref, tout cerveau humain met en place des mécanismes de défense pour protéger l’estime de soi : c’est parfaitement NORMAL.
Ce n’est pas la présence des mécanismes de défense qui est nuisible,
mais la manière dont nous les utilisons selon leur fréquence et leur intensité.
Dit de manière simple, avoir recours à un mécanisme de défense parce qu’on est affecté par la mort d’un proche est plutôt bénéfique. Il évite à notre appareil psychique de « déglinguer », à tolérer plus facilement une situation émotionnelle insupportable.
En revanche, le recours constant, forcé, abusif, des mécanismes de défense, pour occulter une réalité que l’on n’accepte pas au quotidien, peut avoir des effets pervers et imprévisibles.
Non seulement, cette utilisation immodérée des mécanismes de défense coupe la personne de la réalité tel l’effet d’un « voile noir » tendu par sa propre imagination, mais en plus, elle l’empêche de prendre conscience des travers de son comportement avec des répercussions négatives sur ses relations humaines.
À l’image de la personne hypersensible qui s’auto-handicape dans ses relations à cause de la peur de l’attachement ou de revivre des expériences douloureuses. Ou la personne qui fait le déni d’une maladie grave ou la femme qui fait le déni de grossesse au point de ne pas le savoir. Tous les signes, indices, remarques d’autrui, qui peuvent lui renvoyer vers son infirmité, elle le prendra d’une manière agressive et anormale.
MÉCANISMES DE DÉFENSE : UNE ÉNERGIE DÉPENSÉE POUR QUELLE UTILITÉ ?
Retenons cette idée très importante :
Quand vous luttez psychologiquement contre un mal-être (un défaut, un handicap…), investir dans les mécanismes de défense demande une énergie que vous n’imaginez même pas. C’est un processus épuisant, artificiel, qui vous coupe avec votre naturel.
Si vous allez vers les gens en traînant dans votre inconscient toutes ces tensions, vous ne serez jamais 100 % naturel à cause d’un petit pourcentage latent de conflits internes.
Voici la question que je vous pose : pourquoi laisser nos mécanismes de défense investir une énergie folle pour se préserver ? Pourquoi s’handicaper d’un poids supplémentaire alors qu’on veut juste converser normalement et prendre du plaisir avec les autres ?
Autant interagir avec la vie, avec les gens, en n’ayant aucune de ces tensions et en s’acceptant pleinement. De cette manière, vous désamorcez tous ces conflits psychiques lourds et inutiles dans l’inconscient et vous diminuez considérablement cette énergie pour ne laisser s’exprimer que votre naturel.
Le travail d’acceptation de soi est fondamental et constitue la clé du mieux-être.
L’OBLIGATION DE S’INTROSPECTER POUR GUÉRIR
Pour se rendre compte de l’impact de l’utilisation de ces mécanismes de défense sur notre comportement, repensez aux deux exemples choc de situation plus haut avec Marine et Hugo.
Enlevez dans les paragraphes tous les mécanismes utilisés par chacun : la projection, le déni, le refoulement, la rationalisation, la compensation. Et imaginez simplement comment seraient aujourd’hui Marine et Hugo…
Car oui, les mécanismes de défense deviennent de véritables handicaps quand ils entretiennent un sentiment illusoire de sécurité et nous empêchent de voir la réalité.
Examiner nos mécanismes de défense permet de comprendre la plupart de nos réactions mais à corriger aussi les aspects non productifs de ces stratagèmes mentaux et au final, à évoluer définitivement sur le chemin de la guérison.
très très bon article
je me reconnais vraiment dans ce que tu racontes (avant ma prise de conscience)
et je reconnais aussi d’autres personnes.
j’aurais aimé plus de détails sur le « accepter sa timidité »
car on comprend bien le problème mais plus difficilement la façon de le vaincre.
Très bon article,
Maintenant la prise de conscience permet de mettre en lumière, mais quelle(s) thérapie(s) pour avancer
Merci pour cet article, je le comprend ENFIN pleinement ;)
Bonjour,
J’aimerais utiliser votre article pour un travail sur la projection. Je me permets donc de vous demander si vous pouvez me communiquer votre nom en message privé.
Bien à vous,
19/20 pour votre article car il ne s’arrête pas seulement sur l’explication de la notion, mais va jusqu’à aider pour la comprehension de la personnalité.
Excellent article pour identifier et prendre conscience de ce handicap…J’avais jamais vu et lu ça avant je vais m’y pencher sérieusement! Merci encore